Violences faites aux femmes : ce que révèle l’affaire Pélicot

Paru le 19 novembre 2025



L’affaire Pélicot, en France, a révélé l’ampleur d’une violence sexuelle et conjugale organisée. Au Québec, une enquête d’Urbania a testé nos réactions. Comme le souligne Alexane Guérin, ces violences ne sont pas rares. Elles sont ordinaires et exigent des réponses qui vont au-delà des tribunaux.

Mise en contexte : l’affaire Pélicot et les viols de Mazan

Entre 2011 et 2020, Dominique Pélicot a drogué son épouse pour la livrer à des dizaines d’hommes, recrutés via des forums en ligne. Le procès des « viols de Mazan », tenu en 2024, a condamné 51 hommes pour viol aggravé, révélant l’ampleur d’une violence systémique et la persistance d’une culture du viol en France.

Une affaire hors norme par son organisation, mais qui révèle une vérité dérangeante : la culture du viol ne se limite pas aux crimes isolés. Elle s’inscrit dans des pratiques banalisées, des imaginaires collectifs et des silences complices.

L’enquête d’Urbania : et si cela arrivait ici ?

Un an après le procès, Urbania a mené une expérience choc au Québec : publier une fausse annonce sur un site de rencontres, « Viens coucher avec ma femme endormie ». En 48 heures, plus de 100 hommes ont répondu. Très peu ont questionné le consentement. Cette enquête, troublante, montre que la culture du viol n’est pas « ailleurs ». Elle est ici, dans nos rues, nos écrans, nos conversations. Elle prospère sur l’idée que le corps des femmes est disponible, que le silence vaut accord.

Le « viol ordinaire » : comprendre l’invisible

Comme le souligne la chercheuse Alexane Guérin, 91 % des viols sont commis par un proche ou un partenaire intime. Ces violences, inscrites dans la banalité des relations amoureuses ou amicales, sont difficiles à nommer et à dénoncer. Le concept de « viol ordinaire » vise à rendre visibles ces violences qui échappent aux représentations classiques du viol (ruelle sombre, inconnu armé) et à interroger les rapports de pouvoir dans l’intimité. Nommer ces violences, c’est briser l’illusion que le viol est rare ou exceptionnel.

Après Mazan : repenser la justice et la masculinité

Le podcast Les Couilles sur la table consacre une série à l’après-procès Mazan. Il interroge la responsabilité collective : comment des « hommes ordinaires » ont pu participer à ces crimes ? Quels liens entre masculinité, domination et violences sexuelles ? Les épisodes explorent aussi les limites du système pénal et les pistes pour une justice qui répare, au-delà de punir. 

La médiation spécialisée : une réponse québécoise

Au Québec, Équijustice propose un service de médiation spécialisée pour les personnes victimes et auteurs de violences sexuelles, lorsque les conditions de sécurité et de consentement sont réunies. Cette démarche, volontaire et encadrée, offre un espace pour exprimer le vécu, obtenir des réponses et restaurer une forme de pouvoir d’agir. Elle ne remplace pas la justice pénale, mais répond à des besoins que celle-ci ignore : reconnaissance, écoute, dialogue, réparation

Agir contre la culture du viol

L’affaire Pélicot, l’enquête d’Urbania et les travaux sur le « viol ordinaire » nous rappellent que la lutte contre les violences sexuelles ne se limite pas à sanctionner des crimes extrêmes. Elle exige de nommer les violences invisibles, de transformer les imaginaires et de créer des options de justice centrés sur les personnes et qui réparent.

Pendant ces 16 jours d’activisme, la question n’est pas seulement : « Que faire des agresseurs ? », mais : comment changer la norme ?

Quelles que soient votre situation ou vos questions